Bercy met en place une cellule de continuit conomique

August 2024 · 5 minute read


Se refusant à donner "des chiffres fantaisistes" sur l’impact du coronavirus sur l’économie française, Bruno Le Maire a annoncé de nouvelles mesures de soutien aux entreprises. "Nous répondrons aux attentes, aux besoins, de tous les chefs d’entreprise, sans exception", a déclaré le ministre de l’Économie et des Finances, mardi 3 mars, lors d'une conférence de presse, après avoir réuni l’ensemble des acteurs économiques du pays pour un point d'étape sur l'épidémie de coronavirus. "La solidarité nationale doit s’exercer sur tout le territoire", a-t-il appuyé, précisant que la "cellule de continuité économique" de Bercy allait être activée afin d’obtenir "toutes les informations nécessaires sur la situation économique du pays en temps réel". Cette cellule avait déjà été mise en oeuvre au moment de la crise du H1N1 en 2009 et, plus récemment, pendant la crise des gilets jaunes. Le ministre a aussi indiqué qu’il recevrait les présidents de région "en fin de semaine", pour coordonner leur action avec celle de l’État. Au 3 mars, seules deux régions – Centre-Val de Loire et Corse – restaient épargnées par l’épidémie. 

"Notre responsabilité est de faire en sorte que cet impact soit le plus limité possible et que l'activité économique puisse redémarrer après le virus dans les meilleurs délais possibles. (...) Il faut mettre le paquet tout de suite", a-t-il dit, rappelant les mesures prises pour soulager la trésorerie des entreprises. La veille, la direction générale des entreprises (DGE) avait listé ces mesures d’accompagnement mobilisables par les entreprises : report d’échéances sociales et fiscales, recours au chômage partiel, activation des clauses de force majeure permettant d’éviter d’appliquer les pénalités de retards dans les marchés publics de l’État et des collectivités… Les PME pourront également saisir la médiation du crédit pour obtenir un rééchelonnement de leurs crédits. Elles bénéficieront aussi d'une facilité d’obtention de crédit bancaire via une garantie de Bpifrance portée de 40 à 60%. Le ministre a aussi appelé les grands donneurs d’ordre à faire preuve de "solidarité" vis-à-vis de leurs sous-traitants et les bailleurs à de la "compréhension" concernant les baux commerciaux.

Après avoir eu écho de cas d'importantes augmentations de prix sur les gels hydroalcooliques ou les masques de protection dans certaines pharmacies et commerces physiques ou en ligne, le ministre a chargé la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) de lancer une enquête. Si de telles pratiques sont confirmées, Bruno Le Maire prendra un "décret d’encadrement des prix". "Je n’accepterai pas la moindre spéculation", a-t-il martelé. À noter que le président de la République a annoncé le même jour que l’État allait réquisitionner tous les stocks de masques pour les réserver aux personnels soignants et aux malades.

Bruno Le Maire a par ailleurs assuré qu’il n’y avait "pas de risque de pénurie sur les biens essentiels dans la grande distribution" (pâtes, riz, fruits, légumes, viande…). Une réunion devait se tenir avec les représentants de la grande distribution dans la journée pour s’assurer que les circuits d’approvisionnement sont garantis.

Sécuriser les chaînes d'approvisionnement

Le gouvernement veut plus largement mener une réflexion sur la sécurisation des chaînes d'approvisionnement dans certaines filières industrielles stratégiques dans le cadre de son "pacte productif". S’agissant des médicaments, un chantier est déjà lancé avec la mission confiée à l’ancien président de Polytechnique Jacques Biot cet automne, qui remettra ses conclusions "dans les prochains jours", a indiqué la secrétaire d’État Agnès Pannier-Runacher, alors que la France est dépendante à 80% de l’étranger pour la fourniture de principes actifs, dont 40% en provenance de Chine. Mais la crise et la mise à l’arrêt des usines chinoises amène une réflexion plus large. "C’est toute la politique que nous menons depuis trois ans et qui vise à rendre la France plus attractive", a insisté Bruno Le Maire. "Quelles sont les filières industrielles que nous allons pouvoir développer en France (…). Les délocalisations ne peuvent plus être l’avenir de la France. La souveraineté technologique est une des conditions de la souveraineté politique", a-t-il développé. "Il y a un alignement des astres dont nous devons profiter pour gagner cette bataille." Le ministre inscrit cette "réorientation" dans la stratégie industrielle que le commissaire au Marché intérieur Thierry Breton doit présenter le 10 mars (ce dernier entend identifier une vingtaine d’"écosystèmes" industriels stratégiques pour l’Europe). Bruno Le Maire appelle de ses vœux "un programme de soutien européen sur l’hydrolyse verte" pour bâtir une filière hydrogène européenne.

Un impact "significatif" sur l'économie

Après avoir rencontré son homologue allemand Olaf Scholz, lundi, Bruno Le Maire devait se rendre à une réunion des ministres des Finances du G7 mardi. "Je peux vous assurer qu'au niveau du G7, comme au niveau de la zone euro, nous aurons des réponses coordonnées, fortes, rapides, face cette crise", a-t-il dit, alors que les marchés ont chuté ces derniers jours. Il a aussi appelé la Commission européenne à faire preuve de "compréhension" et de "souplesse" dans le calcul des dépenses qui seront affectées à la crise.

Le ministre qui rencontrera des économistes, mercredi, a indiqué que la crise aurait un impact "significatif" sur la croissance française. Les secteurs les plus touchés sont le tourisme, la restauration, l’hôtellerie, l’événementiel, les traiteurs, le transport aérien, les vins et spiritueux, le luxe et les services à la personne. Des villes comme Tarbes et Lourdes (Hautes-Pyrénées) ont enregistré l’annulation de quelque 20.000 nuitées. Sur l’ensemble du pays, le chiffre d’affaires de l'hôtellerie a chuté d’environ 20%. Le gouvernement présentera aux préfets "dans les prochains jours" une circulaire sur les conditions d’annulation des foires et salons pour "donner de la visibilité" sur les consignes à suivre.
"Après des mois difficiles pour les commerces de proximité, il est temps de prendre des mesures sur le long terme pour favoriser une économie locale et les circuits courts, garants du dynamisme de nos territoires et d’une économie nationale plus forte", avait réagi lundi Bernard Stalter, le président de CMA France qui a lancé une enquête auprès de son réseau pour "prendre le pouls" des difficultés des entreprises artisanales.

De son côté, après avoir déjà obtenu que le coronavirus soit considéré comme un cas de "force majeure", la CPME (Confédération des PME) plaide pour une extension du risque de catastrophe naturelle à celui de risque sanitaire.

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